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🌊 Tsunami : causes et consĂ©quences

Mis Ă  jour le 21/02/2018233 K lectures

Sommaire

tsunami-Tohoku-SendaiSurvol d'hélicoptÚre du port de Sendai au Japon aprÚs le tsunami de 2011. En arriÚre plan, la raffinerie Nippon Oil Sendai oil en feu
Crédit : U.S. Navy - Licence : CC0

Les tsunamis : définition

Le tsunami est une onde marine exceptionnelle déclenchée par un soudain déplacement du plancher océanique.

On lui attribue parfois des appellations ambiguĂ«s : seismic sea wave (vague marine sismique) car les sĂ©ismes sont la premiĂšre cause de leur dĂ©clenchement, tidal wave, mĂȘme si les tsunamis n'ont rien Ă  voir avec la marĂ©e. D'ailleurs tsunami vient du japonais qui signifie "vague causĂ©e par la marĂ©e"...

On les trouve dans tous les océans, surtout dans l'océan Pacifique qui est notamment délimité par la Ceinture de Feu, et dans certaines mers comme la Méditerranée.
Ils peuvent ĂȘtre dĂ©vastateurs et meurtriers comme en tĂ©moignent le tsunami du 26 dĂ©cembre 2004 qui a tuĂ© 280 000 personnes et celui qui a dĂ©vastĂ© les cĂŽtes nord-ouest du Japon le 11 mars 2011...

Caractéristiques hydro-dynamiques des tsunamis

Tsunami en pleine mer

Dans le cas des vagues ocĂ©aniques, les termes utilisĂ©s sont pour l'essentiel les mĂȘmes que ceux qui s'appliquent aux autres types d'ondes :
  • longueur d'onde : distance entre 2 crĂȘtes successives ;
  • frĂ©quence ou pĂ©riode : intervalle de temps entre 2 crĂȘtes successives ;
  • hauteur : dĂ©nivellation entre crĂȘte et creux ;
  • amplitude : dĂ©nivellation entre la crĂȘte et le niveau moyen de la mer. Attention ! Pour la plupart des ondes, l'amplitude reprĂ©sente la moitiĂ© de la hauteur ;
  • run-up. L'amplitude du tsunami Ă  son contact avec la cĂŽte (dĂ©ferlement) est appelĂ©e run-up par les Anglo-saxons, il s'agit de l'altitude maximale de la zone inondĂ©e par le tsunami ;
  • vitesse ;
CrĂȘte Creux Niveau de la mer Longueur d'onde Amplitude Hauteur Plateau continental SchĂ©ma d'un tsunami Ă  l'approche de la cĂŽte.
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On classe les tsunamis en fonction de leur magnitude, qui correspond Ă  l'Ă©nergie totale libĂ©rĂ©e par le tsunami. Plusieurs Ă©chelles de magnitude sont utilisĂ©es, l'une des plus pratiques Ă©tant celle d'Imamura Iida, oĂč la magnitude est Ă©gale au logarithme (en base 2) de la hauteur maximum de la vague principale le long de la cĂŽte :

m = logHmax

Son fonctionnement étant identique à l'échelle de Richter pour les séismes, il est aisé de comparer la magnitude d'un tsunami et celle du séisme qui l'a généré. Cependant, cette formule ne prend pas en compte l'extension géographique des tsunamis.

Echelle d’intensitĂ© des tsunamis de Papadopoulos et Imamura

Echelle d’intensitĂ© des tsunamis de Papadopoulos et Imamura (2001)
IntensitéPerceptionEffets ressentisDégùts occasionnés
I. Imperceptible
II. Peu perceptiblePerçu par quelques individus à bord de petites embarcations. Non observé sur la cÎtePas d'effetsPas de dégùts
III. FaiblePerçu par la plupart des individus à bord de petites embarcations. Observé par quelques individus sur la cÎtePas d'effetsPas de dégùts
IV.Perçu par tous les individus à bord de petites embarcations et par quelques-uns à bord de gros bateaux. Observé par la plupart des individus sur la cÎteQuelques petits bateaux se déplacent légÚrement sur le rivagePas de dégùts
V. Vague de 1 mĂštrePerçu par tous les individus Ă  bord de gros bateaux et observĂ© par tous sur la cĂŽte. Quelques personnes sont effrayĂ©es et courent se rĂ©fugier en des points plus Ă©levĂ©sDe nombreuses petites embarcations sont fortement dĂ©placĂ©es sur le rivage ; quelques unes s’entrechoquent ou se retournent. Traces de dĂ©pĂŽt de sable sur le sol, le cas Ă©chĂ©ant. Inondation limitĂ©e des terres cultivĂ©esInondation limitĂ©e des parties Ă  ciel ouvert (tels que jardins) des constructions proches du rivage
VI. Vague de 2 mĂštresDe nombreuses personnes sont effrayĂ©es et courent se rĂ©fugier en des points plus Ă©levĂ©sLa plupart des petites embarcations sont fortement dĂ©placĂ©es sur le rivage, s’entrechoquent ou se retournentQuelques constructions en bois sont endommagĂ©es et inondĂ©es. La plupart des bĂątiments en maçonnerie rĂ©sistent
VII. Vague de 4 mĂštresDe nombreuses personnes sont effrayĂ©es et tentent de courir se rĂ©fugier en des points plus Ă©levĂ©sDe nombreuses petites embarcations sont endommagĂ©es. Quelques gros bateaux oscillent violemment. Des objets de taille et de stabilitĂ© variables se retournent et partent Ă  la dĂ©rive. L’eau laisse des dĂ©pĂŽts de sable et des amas de galets. Quelques pontons utilisĂ©s pour l’aquaculture sont emportĂ©s. De nombreuses constructions en bois sont endommagĂ©es ; quelques-unes sont dĂ©truites ou emportĂ©es par l’eau. DĂ©gĂąts de niveau 1 et inondation dans quelques bĂątiments en maçonnerie
VIII. Lourds dĂ©gĂątsTout le monde s’enfuit vers les hauteurs, quelques personnes sont emportĂ©esLa plupart des petites embarcations sont endommagĂ©es, et beaucoup sont emportĂ©es. Quelques gros bateaux sont dĂ©placĂ©s sur le rivage ou entrent en collision. De gros objets sont emportĂ©s. Érosion et dĂ©pĂŽt de dĂ©tritus sur la plage. Les forĂȘts de protection contre les tsunamis et les dispositifs anti-dĂ©rive subissent de lĂ©gers dĂ©gĂąts. De nombreux pontons utilisĂ©s pour l’aquaculture sont emportĂ©s, et quelques-uns sont partiellement endommagĂ©s.La plupart des constructions en bois sont emportĂ©es ou dĂ©truites. Quelques bĂątiments en maçonnerie subissent des dĂ©gĂąts de niveau 2. La plupart des bĂątiments en bĂ©ton armĂ© sont endommagĂ©s ; quelques-uns subissent des dĂ©gĂąts de niveau 1 et on observe des inondations.
IX. Vague de 8 mĂštresDe nombreuses personnes sont emportĂ©es par les eauxLa plupart des petites embarcations sont dĂ©truites ou emportĂ©es. Beaucoup de gros bĂąteaux sont violemment dĂ©placĂ©s sur le rivage et quelques-uns sont dĂ©truits. Forte Ă©rosion et importants dĂ©pĂŽts de dĂ©tritus sur la plage. Effondrements de terrain par endroits. Destructions partielles des forĂȘts de protection contre les tsunamis et des dispositifs anti-dĂ©rive. La plupart des pontons d’aquaculture sont emportĂ©s, et beaucoup sont partiellement endommagĂ©s DĂ©gĂąts de niveau 3 pour de nombreux bĂątiments en maçonnerie et de niveau 2 pour quelques bĂątiments en bĂ©ton armĂ©
X. Grosses destructionsPanique gĂ©nĂ©rale. La plupart des gens sont emportĂ©sLa plupart des gros bateaux sont violemment Ă©chouĂ©s, et beaucoup sont dĂ©truits ou viennent heurter des bĂątiments. De petits rochers provenant du fond de la mer sont rejetĂ©s Ă  terre. Les voitures sont renversĂ©es et partent Ă  la dĂ©rive. Fuites d’hydrocarbure, dĂ©buts d’incendies. Nombreux effondrements de terrainDĂ©gĂąts de niveau 4 pour de nombreux bĂątiments en maçonnerie, et de niveau 3 pour quelques bĂątiments en bĂ©ton armĂ©. Digues et levĂ©es s’écroulent, les brise-lames dans les ports sont endommagĂ©s
XI. DĂ©vastation : vague de 16 mVoies de communication vitales coupĂ©es. Nombreux incendies. En se retirant, les eaux emportent les voitures et d’autres objets. De gros rochers provenant du fond de la mer sont rejetĂ©s Ă  terreBon nombre de bĂątiments en maçonnerie subissent des dĂ©gĂąts de niveau 5. Quelques bĂątiments en bĂ©ton armĂ© subissent des dĂ©gĂąts de niveau 4, et beaucoup subissent des dĂ©gĂąts de niveau 3
XII. Dévastation totale : vague de 32 mPresque tous les bùtiments en maçonnerie sont détruits. La plupart des bùtiments en béton armé subissent des dégùts au moins de niveau 3

Echelle d'intensité de Sieberg et Ambraseys

Un autre paramÚtre important est l'intensité du tsunami, qui représente la force de la vague en un lieu donné. L'échelle couramment utilisée est celle de Sieberg, modifiée par Ambraseys (1962) qui classe les tsunamis de 1 (pas de dommages) à 6 (désastreux). En 2001, une échelle en 12 niveaux a été proposée par Gerassimos Papadopoulos et Fumihiko Imamura. Elle est basée sur les conséquences des tsunamis sur les humains, les objets (bateaux) et les constructions.

Echelle d'intensité de Sieberg et Ambraseys
IntensitéEffets ressentis
1. TrĂšs lĂ©gĂšreOnde si faible qu’elle n’est perceptible que sur les marĂ©grammes.
2. LĂ©gĂšreVague observĂ©e par les populations du littoral et les habituĂ©s de la mer. RemarquĂ©e par tous, sur des rivages trĂšs plats. Onde si faible qu’elle n’est perceptible que sur les marĂ©grammes.
3. Assez forteRemarquĂ©e par tous. Inondation des cĂŽtes en pente douce. Embarcations lĂ©gĂšres Ă©chouĂ©es. Constructions lĂ©gĂšres proches des cĂŽtes faiblement endommagĂ©es. Dans les estuaires, inversion des cours d’eau jusqu’à une certaine distance en amont.
4. ForteInondation du rivage sous une certaine hauteur d’eau. LĂ©ger affouillement des espaces amĂ©nagĂ©s. LevĂ©es et digues endommagĂ©es. Constructions lĂ©gĂšres endommagĂ©es prĂšs des cĂŽtes. Constructions en dur dĂ©tĂ©riorĂ©es sur la cĂŽte. Gros voiliers et petits navires Ă©chouĂ©s Ă  terre ou emportĂ©s au large. CĂŽte jonchĂ©e de dĂ©bris flottants.
5. TrĂšs forteInondation gĂ©nĂ©rale du rivage sous une certaine hauteur d’eau. Murs brise-lames et constructions en dur proches de la cĂŽte endommagĂ©s. Constructions lĂ©gĂšres dĂ©truites. Profond affouillement des terres cultivĂ©es et cĂŽte jonchĂ©e d’objets flottants et d’animaux marins. Exception faite des gros navires, toutes les catĂ©gories d’embarcations sont Ă©chouĂ©es ou emportĂ©es au large. Grands mascarets dans les estuaires. Ouvrages portuaires endommagĂ©s. Noyades. Vague accompagnĂ©e d’un fort rugissement.
6. CatastrophiqueDestruction partielle ou complĂšte des constructions Ă©difiĂ©es par l’homme jusqu’à une certaine distance du rivage. Inondation des cĂŽtes sous une grande hauteur d’eau. Gros navires gravement endommagĂ©s. Arbres brisĂ©s ou dĂ©racinĂ©s. Nombreuses victimes.

Caractéristiques des tsunamis

La longueur d'onde des vagues océaniques est en moyenne de 100 m, alors que celle des tsunamis peut excéder 200 km.
Leur vitesse de propagation en pleine mer est de plusieurs centaines de km/h (180 km/h pour le tsunami du 2 septembre 1992 au Nicaragua), et peut ĂȘtre dix fois plus rapide que celle des vagues normales (90 km/h environ) car la vitesse augmente avec la profondeur (pas d'influence de la rugositĂ© du fond).
Ex. : 500 km/h pour le tsunami du 26/12/2004 dans l'océan Indien et 800 km/h pour le tsunami du 1er Avril 1946 né en Alaska et qui ravagea la ville de Hilo à Hawaii 4,5 h plus tard (18 m de haut, 150 victimes).

  • Dans le cas d'une sĂ©rie de tsunamis, la frĂ©quence entre 2 crĂȘtes est Ă©levĂ©e, jusqu'Ă  une heure, malgrĂ© leur vitesse rapide, car la frĂ©quence dĂ©pend surtout de leur longueur d'onde qui est trĂšs grande.
  • En pleine mer, l'amplitude des tsunamis reste gĂ©nĂ©ralement faible, infĂ©rieure Ă  1 m, mais peut atteindre plusieurs mĂštres dans certains cas.

Tsunami Ă  l'approche et au contact de la cĂŽte

L'onde du tsunami, nĂ©e du choc sismique du haut en bas de la masse ocĂ©anique, est Ă©paisse de plusieurs centaines de mĂštres et gagne en Ă©nergie chaque fois qu'elle heurte le plancher sous-marin. Des masses d'eau importantes glissent en profondeur le long des dĂ©formations du sol marin, Ă  la diffĂ©rence des vagues ordinaires qui n'affectent que la surface de l'eau. À cause de la relation entre la vitesse de propagation et de la profondeur du fond ocĂ©anique, les tsunamis sont freinĂ©s trĂšs brutalement dĂšs qu'ils atteignent la plate-forme continentale. Ceci entraĂźne une augmentation trĂšs forte de l'amplitude de la vague, qui atteint frĂ©quemment 5 ou 10 m. Dans les cas les plus dramatiques relevĂ©s (voir tableau ci-dessous), le run-up a pu atteindre 20, 30, voire 40 m pour le tsunami dĂ©clenchĂ© par l'Ă©ruption du volcan Krakatoa (IndonĂ©sie, 1883). Le record semble appartenir au tsunami du 17 octobre 1737 dans le nord des Kourilles avec 60 m.
À cause de leur grande longueur d'onde, la crĂȘte du tsunami Ă  la cĂŽte peut durer plusieurs minutes, ce qui augmente les risques.

Le run-up

Le run-up des tsunamis à la cÎte est déterminé par la combinaison de plusieurs méthodes :

  • Observation visuelle
  • Marques laissĂ©es par l'eau ou les dĂ©bris transportĂ©s par la vague sur les bĂątiments.

Le run-up d'un tsunami est fonction de plusieurs facteurs : profondeur, morphologie du plancher ocĂ©anique, tracĂ© de la cĂŽte. Dans certains cas, la cĂŽte peut rĂ©fracter le tsunami et l'orienter en direction de ports ou de baies habituellement protĂ©gĂ©es des vagues de tempĂȘtes. Il est donc important d'Ă©tablir des cartes de risques avec plusieurs scĂ©narios fondĂ©s sur diffĂ©rentes orthogonales de vagues exceptionnelles (mĂȘme principe qu'orthogonales de houle, mais les rĂ©sultats sont trĂšs diffĂ©rents).
Quand l'énergie d'un tsunami est concentrée dans un secteur précis à cause de la configuration de la cÎte et/ou du plancher océanique, il est appelé wave trap (trappe à vague) par les Anglo-saxons. Si le tsunami est concentré dans un secteur resserré comme une baie longue et étroite ou l'embouchure d'un cours d'eau, il peut prendre la forme d'un mur appelé bore (trou). Dans ces cas, la force du tsunami est exceptionnelle : un des trois principaux tsunamis engendrés par l'explosion du Krakatoa en 1883 transporta un bloc de corail de 600 t à 100 m à l'intérieur des terres et un bateau à 2,5 km et à 24 m d'altitude. Ceux du Santorin ravagÚrent la cÎte nord de la CrÚte.

Le comportement d'un tsunami à l'approche de la cÎte diffÚre de celui des autres vagues océaniques.
Parfois, le niveau de la mer baisse notablement juste avant l'arrivée du tsunami car l'eau littorale est en quelque sorte aspirée par l'immense rouleau que forme le tsunami (cf. citerna). Ce phénomÚne est appelé drawdown par les Anglo-saxons. Bien évidemment, il ne faut pas s'aventurer dans la zone émergée, mais au contraire se réfugier sur des topographies élevées.
Dans d'autres cas, le premier mouvement de l'eau littorale est au contraire une élévation (serait-ce la pression exercée sur l'eau littorale par le tsunami ?).

Des vidéos édifiantes du tsunami du 11 mars 2011 au Japon montrent comment le tsunami pénÚtre à l'intérieur des terres et ravage les cÎtes.

Les causes des tsunamis

Chaque événement qui entraßne un déplacement significatif du plancher océanique cause aussi le déplacement d'un volume d'eau équivalent, qui peut donner naissance à un tsunami. La plupart des tsunamis sont issus des séismes, mais d'autres peuvent aussi résulter d'éruptions volcaniques, de glissements de terrain ou d'activités humaines (essais nucléaires).

Les séismes

Le plus souvent, les tsunamis rĂ©sultent de tremblements de terre se produisant Ă  proximitĂ© des cĂŽtes. Tout sĂ©isme qui engendre un tsunami est qualifiĂ© de sĂ©isme tsunamigĂ©nique (Tsunamigenic Earthquake). L'un des plus cĂ©lĂšbre est celui qui toucha les cĂŽtes du Portugal en 1755. Il produisit une sĂ©rie de tsunamis de 5 m de haut qui firent 60 000 victimes Ă  Lisbonne, soit 1/4 de la population de la ville. Cet exemple est significatif car l'on pense souvent que les tsunamis sont le domaine rĂ©servĂ© du Pacifique, or mĂȘme les cĂŽtes françaises ne sont pas Ă©pargnĂ©es. Le sĂ©isme de 8,9 de Sumatra en dĂ©cembre 2004 produisit Ă©galement de nombreux tsunamis avec plusieurs vagues d'une dizaine de mĂštres de haut qui furent dĂ©vastatrices.

La magnitude des tsunamis est en général liée à celle des séismes qui les ont initiés. Ainsi, un gros séisme risque de générer tsunami important.
Par exemple le tsunami du 28 mars 1964 qui détruisit en partie Hilo (Hawaï) fut déclenché en Alaska par le séisme Good Friday de magnitude 9 (le plus fort connu avec celui du Chili en 1960).

Cependant, cette corrĂ©lation est loin d'ĂȘtre aussi simple car les tsunamis rĂ©sultent essentiellement de dĂ©formations verticales de la croĂ»te, mĂȘme de faible ampleur comme en tĂ©moigne le fameux sĂ©isme qui dĂ©truisit San Francisco en 1906 sans produire de tsunami malgrĂ© sa magnitude de 8,3 sur l'Ă©chelle de Richter (450 victimes, 28 000 maisons dĂ©truites). La cause rĂ©side dans le rejet infĂ©rieur Ă  un mĂštre, malgrĂ© plus de 6 m de coulissage le long de la faille de San AndrĂ©as en partie immergĂ©e.
En revanche, les sĂ©ismes faisant jouer ou rejouer des failles conformes ou inverses sont Ă  mĂȘme d'engendrer des tsunamis, mĂȘme pour des rejets limitĂ©s.

Cependant, mĂȘme le long de failles verticales, les gros sĂ©ismes ne produisent parfois que des tsunamis de magnitude modeste voire aucun. A l'inverse, des sĂ©ismes modestes peuvent dĂ©clencher des tsunamis d'une magnitude exceptionnelle. Cette derniĂšre catĂ©gorie spĂ©cifique de sĂ©isme tsunamigĂ©nique.est appelĂ©e par les experts japonais sĂ©isme tsunami (Tsunami Earthquake).
Les 2 exemples les plus célÚbres de séisme tsunami sont ceux de Sanriku (Honshu) le 15 juin 1896 (24 m de haut, 26 000 victimes) et du 1 avril 1946 au large de l'ßle d'Unimak (Aléoutiennes, Alaska), qui atteint Hawaï avec une amplitude se 18 m à Hilo.

Les séismes tsunami naissent dans la plupart des cas le long d'une marge active de plaque caractérisée par une profonde fosse océanique (zones de subduction). Il existe deux raisons principales pour que des séismes modérés produisent des tsunamis de forte magnitude :

  1. Le glissement de sédiments dans une marge d'accrétion. Les sédiments trÚs volumineux qui composent le prisme d'accrétion, en équilibre instable, peuvent glisser le long du plan de Benioff et entraßner un tsunami exceptionnel (cas sans doute des tsunamis de Sanriku 1896 et Unimak en 1946).
  2. Dans les zones de subduction dépourvues de prisme d'accrétion, le principal facteur de déclenchement est la création d'un nouveau plan de rupture, d'une nouvelle faille verticale.
  3. Ex. : séisme du 2 septembre 1992 au Nicaragua, de magnitude 7 (modéré), a 60 km de la cÎte (contact plaques Cocos et Caraïbe) qui déclencha un tsunami de 8 à 15 m de haut qui toucha l'ensemble de la cÎte ouest du pays.

Pour la prĂ©vention des risques, les sismologues n'utilisent plus seulement l'Ă©chelle de Richter, mais le « moment sismique », une mesure qui prend en compte les propriĂ©tĂ©s d'Ă©lasticitĂ© de la croĂ»te et la superficie moyenne de la zone oĂč des dislocations de la croĂ»te se produisent pendant un sĂ©isme.

Les Ă©ruptions volcaniques

La fréquence des tsunamis causés par une éruption est beaucoup plus faible que celle des précédents : seulement 2 % en Méditerranée, essentiellement en Italie, surtout par le Vésuve (à 11 reprises, par ex. en 79 avt JC et surtout en 1631). Et Seulement 6 des 109 tsunamis régionaux déclenchés dans la région Kourilles-Kamtchatka de 1737 à 1990.
En revanche, la magnitude des tsunamis d'origine volcanique peut ĂȘtre beaucoup plus forte que celle des tsunamis d'origine sismique. Les deux tsunamis les plus catastrophiques de l'Histoire furent dĂ©clenchĂ©s par l'Ă©ruption d'un volcan insulaire de type explosif : Santorin 1600 avt JC et Krakatoa 1883. Dans ces deux cas, la formation de plusieurs tsunamis successifs fut liĂ© Ă  une Ă©ruption plinienne suivie de la formation d'une caldeira qui abaissa le plancher ocĂ©anique de plusieurs centaines de mĂštres.

Dans d'autres cas, les tsunamis peuvent rĂ©sulter : d'un Ă©croulement de flanc d'un volcan, gĂ©nĂ©rant une avalanche de dĂ©bris ; de l'arrivĂ©e dans la mer de coulĂ©es pyroclastiques (nuĂ©es ardentes – cf Krakatoa) ou de coulĂ©es de dĂ©bris (lahars). Dans ces derniers cas, plus le volume de matĂ©riaux entrant dans la mer est Ă©levĂ©, plus le tsunami est important.

Les glissements de terrain

Les glissements de terrain tsunamigĂ©niques sont souvent associĂ©s aux sĂ©ismes ou aux Ă©ruptions volcaniques, mais pas toujours. Le plus souvent, les tsunamis sont dĂ©clenchĂ©s le long des parois de canyons sous-marins, dont les flancs s'Ă©croulent de temps Ă  autres. C'est particuliĂšrement le cas le long de la cĂŽte ouest des Etats-Unis. Le sĂ©isme de 1964 en Alaska (Good Friday) gĂ©nĂ©ra au moins 20 glissements de terrain. Celui de Lituya Bay (Alaska) du 9 juillet 1958 de magnitude 7 provoqua un glissement qui repoussa la mer jusqu'Ă  60 m d'altitude sur la rive opposĂ©e, ravageant la forĂȘt.
Le mini-tsunami qui affecta l'aéroport de Nice fut aussi causé par un glissement le long d'un canyon sous-marin.

Les éboulements et les glissements de terrain peuvent générer, dans le pire de cas, des mégatsunamis caractérisés par de puissantes vagues pouvant atteindre jusqu'à 300 mÚtres de haut avec une vitesse de propagation de plus de 900 km/h... Ce risque existe encore actuellement.

Les facteurs anthropiques

Nous pensons bien sûr aux essais nucléaires qui ont déclenché des tsunamis :

  • Ă  l'atoll de Bikini dans les Ăźles Marshall dans les annĂ©es 40 et 50
  • Ă  Mururoa

Il existe Ă©galement d'autres facteurs Ă  l'origine de mini-tsunamis dans les lacs par exemples, mais il ne s'agit pas de tsunamis au sens propre du terme.

Les conséquences des tsunamis sur le littoral

Effets morphologiques : Ă©rosion des plages

Exemples :

  • recul de la plage aprĂšs le passage d'un tsunami de 8 m sur la plage de Marsella, Nicaragua en 1992.
  • recul de 150 m d'une plage de Flores par glissements rĂ©pĂ©tĂ©s sur 2 km de long aprĂšs une vague de 11 m de haut.

Effets Ă©cologiques

Par l'action mécanique des vagues
- destruction de la végétation à FlorÚs.
- débris coralliens transportés jusqu'à 200 m de la cÎte aprÚs le passage du tsunami de Flores en 1992.

Par l'action du sel

A Flores, l'eau salée a tué tous les arbres ayant résisté au choc mécanique des vagues.

Effets humains et sociaux-Ă©conomiques

Les pertes s'Ă©lĂšvent gĂ©nĂ©ralement Ă  plusieurs centaines de victimes, sauf dans les cas les plus graves oĂč elles se comptent par dizaines de milliers (Santorin 1600 av. JC, Lisbonne, 1755, Krakatoa 1883, Honshu 1896, Sumatra 2004).
L'Indonésie est un des pays les plus gravement touchés et ou le risque est le plus important au monde. Certes, l'aléa n'est pas plus fort qu'au Japon, mais la vulnérabilité des populations y est beaucoup plus importante.

Les tsunamis les plus dévastateurs

De 1998 Ă  2017, les tsunamis ont tuĂ© 251 770 personnes et entraĂźnĂ© 280 milliards de dollars de perte Ă©conomique, selon l’Office des Nations Unies pour la rĂ©duction des risques de catastrophe (UNISDR).

Date Localisation Hauteur (m) Origine Commentaire
1600 av JCSantorin (GrĂȘce)?VolcanDĂ©vastation CrĂšte
17/10/1737?60 Nord des Kourilles
01/11/1755Atlantique est5 – 10SĂ©isme 
13/08/1868Pérou - Chili> 10SéismeObservé en Nouvelle-Zélande. Dommages à Hawaii
27/08/1883Krakatoa (Indonésie)40Volcan36 000 morts
15/06/1896Sanriku - Honshu (Japon)24SĂ©isme 7,6Environ 27 000 morts
31/01/1906Equateur - Colombie?SĂ©isme 8,8un millier de morts
03/03/1933Sanriku - Honshu (Japon)> 20SĂ©isme 8,33 000 morts
01/04/1946Aléoutiennes10Séisme150 morts à Hawaï
04/11/1952Kourilles (URSS)20SĂ©isme 9> 2 300 morts
23/05/1960Chili> 10SĂ©isme 9,55 700 morts au Chili, 130 au Japon et 61 Ă  HawaĂŻ
28/03/1964Alaska6SĂ©isme119 morts en Californie
17/08/1976Ile de Mindanao (Philippines)?SĂ©isme5 000 morts
12/12/1992Flores (Indonésie)26Séisme2 100 morts
02/09/1992Nicaragua10Séisme170 morts, 500 blessés
07/1993Japon33Séisme239 morts, 558 maisons détruites
17/07/1998Papouasie-Nouvelle Guinée?Séisme 76 000 à 8 000 morts
17/08/1999Turquie?SĂ©isme 7,617 000 morts
26/12/2004Sumatra (Océan indien)30Séisme 9230 000 morts et disparus
11/03/2011Japon (Océan pacifique)23Séisme 920 000 morts et disparus
22/12/2018Indonésie, Java?Eruption volcanique Anak Krakatau450 morts

Comment prévenir les risques liés aux tsunamis

Il n'existe aucun moyen technique de protection, seule la prévention est possible, et elle est de 2 types.

Prévention à court terme : mise en place de systÚmes d'alerte

Internationaux

SystÚme d'alerte international dans le Pacifique. TrÚs axé sur la surveillance des séismes, en particulier des séismes tsunamis. Basé à Honolulu et géré par NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration). Equipé d'une trentaine de stations sismiques et de 78 marégraphes. Il permet de donner l'alerte 1 heure avant l'arrivée d'un tsunami. Ce dispositif reste effectif uniquement pour les populations vivant à plus de 750 km de la source.

RĂ©gionaux

C'est pourquoi, on a dû mettre en place de nombreux systÚmes d'alerte régionaux, comme à Tahiti, pour des distances de 100 à 750 km de l'épicentre d'un séisme. Dans ce cas, l'alerte est donnée environ 10-12 minutes aprÚs le séisme.

Au Japon, le systÚme OBS (Ocean Bottom Seismograph) permet de détecter les séismes en pleine mer à l'aide de sismographes et d'instruments qui mesurent la pression exercée par l'eau. Deux systÚmes à 2200 m et 4000 m de profondeur. Les données sont transférées toutes les 20 s. par cùble à des stations de surface, puis par téléphone au Tsunami Warning Center de la JMA (Japan Meteorological Agency) à Tokyo.

On utilise des filtres de diffĂ©rentes frĂ©quences afin d'effacer en partie les signaux gĂ©nĂ©rĂ©s par les marĂ©es (BF) ou d'autres signaux parasites qui modifient la pression de l'eau, surtout ceux induits par les changements de tempĂ©rature mais aussi ceux issus de la transmission des donnĂ©es dans le cas oĂč l'appareil recevrait lui-mĂȘme les secousses du sĂ©isme.

Locaux

La population est alertée moins de 10 minutes avant l'arrivée d'un tsunami (inférieur 100 km de là). Ex. : THRUST (Tsunami Hazards Reduction Utilizing Systems Technology) à Valparaiso (Chili).

Prévention à long terme

Mise en place de bases de données exhaustives

Ex : Base de donnée russe pour la région Kourilles-Kamtchatka. PrÚs de 8000 séismes et 124 tsunamis recensés de 1737 à 1990, dont 109 régionaux et 15 transpacifiques.
Idem au Japon : sur 1300 ans de données, 332 tsunamis jusqu'en 1984.

Simulation

Depuis plusieurs années, les sismologues utilisent la technique de l'inversion sismique, qui consiste à analyser en détail les ondes sismiques pour déterminer l'origine des séismes. Cette technique est aussi appliquée aux tsunamis : elle consiste à analyser pour chaque tsunami connu les heures d'arrivée à la cÎte et leur amplitude dans plusieurs sites. Puis on reconstitue la forme de la vague et sa vitesse de propagation, afin de remonter jusqu'au mécanisme déclencheur.
La propagation des tsunamis est relativement facile à modéliser car les facteurs qui interviennent dans la vitesse des vagues sont mieux connus que ceux qui régissent la vitesse des ondes sismiques.
Plusieurs modÚles ont été mis au point, dont ceux de Mansinha-Smylie (1971) qui prend en compte le déplacement du fond océanique de part et d'autre d'une faille. ModÚle critiqué car il donne un profil initial de la vague différent de celui observé. D'autres modÚles ont été développés dans les années 1990, comme ceux de Satake et al., d'Abe et al., Yoshida et al. ou d'Imamura et Shuto. Tous utilisent le modÚle de propagation transocéanique fondé sur la théorie de la Linear Long Wave applicable seulement en eau profonde. Il existe aussi un modÚle français, développé au CEA.
Au final, ces modĂšles demeurent encore imparfaits.

Cartographie des zones menacées

Il s'agit, par exemple, de la cartographie des zones inondables à Hawaï qui est visible sur les botins téléphoniques.

N'oublions pas de mentionner les autres mesures communes à tous les risques naturels : dissémination de l'information, planification préventive, éducation des populations, etc...


Christophe MagdelaineChristophe Magdelaine / notre-planete.info

Franck LAVIGNE, Professeur Ă  l'Institut de GĂ©ographie de Paris

Tous droits réservés

🌊 Tsunami : causes et consĂ©quences ; 21/02/2018 - www.notre-planete.info

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Questions / réactions (9)


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ChrisproIl y a 3 ans
Kel sont les causes directes du stunami ?
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Lura de laubeIl y a 4 ans
@ Kiki le fou : ok
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MamieIl y a 4 ans
ses trÚs intéressant comme on n est confiner
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TessIl y a 4 ans
Que devons savoir essentiellement
sur le tsunami??
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La fleurIl y a 4 ans
G veut les Ă©crits sur les tsunamis et risque tsunamigenique
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